La saga du barème Macron : une histoire sans fin
Alors qu’on le croyait quelque peu éteint, le débat judiciaire portant sur le barème d’indemnisation dit « barème Macron » (art. L.1235-3 du code du travail), connait un nouveau rebondissement avec une décision de la Cour d’Appel de Paris du 16 mars 2021 qui en écarte l’application après avoir procédé à une appréciation in concreto en ces termes :
« Eu égard à cette ancienneté et à la taille de l’entreprise, l’article L. 1235-3 du code du travail fixe l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à une somme comprise entre 3 et 4 mois de salaire, soit sur la base d’un salaire moyen de 4.403,75 euros bruts, une indemnité oscillant entre 13.211,25 et 17.615 euros.
Cette somme représente à peine la moitié du préjudice subi en termes de diminution des ressources financières depuis le licenciement.
Compte tenu de la situation concrète et particulière de Mme Y, âgée de 53 ans à la date de la rupture et de 56 ans à ce jour, le montant prévu par l’article L. 1235-3 ne permet pas une indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT.
En conséquence, il y a lieu d’écarter l’application du barème résultant de l’article L. 1235-3 du code du travail. » (Cour d’appel de Paris Pôle 6, ch. 11, n°19/08721)
On se souvient que dans un arrêt du 30 octobre 2019, la même Cour, mais dans une autre composition, s’était positionnée dans un tout autre sens, celui des avis de la cour de cassation, et avait écarté ce même article 10 de la convention 158 de l’OIT invoqué par l’appelant :
« La mise en place d’un barème n’est pas en soi contraire aux textes visés par l’appelant et les syndicats intervenants volontaires, imposant aux Etats, en cas de licenciement injustifié, de garantir au salarié « une indemnité adéquate ou une réparation appropriée », le juge français dans le cadre des montants minimaux et maximaux édictés sur la base de l’ancienneté du salarié et de l’effectif de l’entreprise, gardant une marge d’appréciation (…). » (CA Paris, pôle 6, ch. 8, 30 octobre 2019, n° 16/05602)
Cette décision, dans le droit fil de l’avis de la Cour de cassation du 17 juillet 2019, semblait fermer la voie à toute appréciation concrète. (Cass. formation plénière, avis n° R19-7010)
La Cour d’appel de Reims, en revanche, avait déjà admis dans un arrêt du 25 septembre 2019 que la conventionalité de principe (in abstracto) du barème qu’elle ne contestait pas ouvrait néanmoins la voie à une analyse in concreto et qu’elle ne (…) dispense pas, en présence d’un dispositif jugé conventionnel, d’apprécier s’il ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits de salarié concerné, c’est-à-dire en lui imposant des charges démesurées par rapport au résultat recherché« . (CA Reims, ch. sociale 25 septembre 2019 RG n° 19/00003)
La Cour d’appel de Paris a donc, à n’en pas douter, remis un jeton dans la machine, (r)ouvrant la voie à un contentieux abondant….
Le barème Macron , une histoire sans fin …